« On ne peut pas devenir galeriste si on n’est pas fils-de » Ne dites surtout pas cela à Arnaud Lebecq, galeriste émergent dans le marché de l’art contemporain asiatique.
Un parcours atypique
Rien ne destinait Arnaud Lebecq à devenir galeriste. Surtout pas une carrière dans l’industrie qui devenait étouffante. Régulièrement pourtant, des déplacements professionnels au bout du monde agissaient comme des respirations. Des espaces de liberté qui permettaient l’éclosion d’autres passions. Comme celle pour l’Asie du Sud-Est, et notamment la Thaïlande, qu’Arnaud a eu la chance de visiter en bonne compagnie – en évitant les écueils du surtourisme. C’est par exemple à Chiang Mai, ville refuge pour les artistes fuyant le fracas de la capitale, que le français a découvert une scène artistique vivante et authentique. Là-bas, il fait une rencontre déterminante : Kitikong Tilokwattanotai, artiste reconnu par ses pairs l’accueille dans son atelier. Une amitié nait, qui se transformera bientôt en collaboration lorsque qu’Arnaud se lancera en tant que galeriste.
Un tournant
Car cela faisait plusieurs années déjà qu’il réfléchissait à transmettre à un public parisien les découvertes artistiques faites en Asie. Un événement précipita les choses : 2018, l’entreprise d’Arnaud réduit la voilure. C’est le déclic. Après tout, il n’est jamais trop tard pour changer de vie, pas même à 55 ans. Arnaud retourne sur les bancs de l’école et redevient même stagiaire, pour un temps à la galerie 193. Une histoire d’entraide entre outsiders, car le fondateur de la 193 a lui aussi bifurqué sur le tard vers l’art contemporain.
Un angle singulier
Dès le départ, c’est une ligne tout à fait originale que choisit Arnaud Lebecq dans le choix de ses artistes. Faire découvrir des artistes d’Asie en France, d’accord, mais Arnaud voulait éviter de s’aventurer dans le marché déjà saturé des artistes chinois, japonais ou coréens. Ce sera donc l’Asie du Sud-Est, une « niche » qui lui offre rapidement la possibilité de se connecter aux diasporas et réseaux à Paris. Dans tout Bangkok, les artistes se renseignent sur ce nouveau venu. Ils demandent conseil à Kitikong Tilokwattanotai, qui tient lieu de parrain dans son pays, après avoir fondé une résidence à Chiang Mai. Arnaud est vite reconnu comme un acteur de confiance.
S’adapter, toujours
Mais le timing n’est pas si opportun : fin 2019, c’est le début de la crise sanitaire, plus personne ne bouge (et surtout pas dans les galeries). Alors Arnaud s’adapte, il adopte un fonctionnement nomade. Louer des espaces au coup par coup, tout en s’exposant dans une foire émergente par an. C’est le modèle qu’a choisi Arnaud pour éviter les lourdeurs d’un espace permanent. Et cela lui a plutôt réussi lorsqu’il exposait dans deux espaces de la rue des Gravilliers. En ce mois d’octobre, c’est sur la rive gauche qu’il a jeté son dévolu. Le travail de son artiste phare, Kitikong Tilokwattanotai, est présenté rue Guénégaud, comme un prolongement de la foire Asia Now toute proche. À l’occasion, Arnaud Lebecq a noué une collaboration avec la galerie de Bangkok SAC Gallery, exposante à Asia Now et représentant l’artiste en Thaïlande.
Quand on n’a pas de pistons, on a des idées.
L’exposition Passés Composés de Kitikong Tilokwattanotai est à voir au 15 rue Guénégaud (75006), jusqu’au 22 octobre (12h-19h, nocturnes les 19 & 20 jusqu’à 21h).